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GUILLAUME DE SAINT-AMOUR.

« Or est fors mis de cest roiaume
« Li bons preudom
« Qui mist cors et vie à bandon !
« Fet l’avez de Chastel-Landon[1].
« La moquerie
« Me vendez, par sainte Marie.
« J’en doi plorer, qui que s’en rie ;
« Je n’en puis mais.
« Se vous estes bien et en pais,
« Bien puet passer avril et mays.
« S’il en carcha[2] por moi tel fais,
« Je li enorte
« Que jus le mete où il le porte,
« Que jà n’est nus qui l’en déporte,

  1. C’est-à-dire : Vous vous êtes moqués de lui. — Les habitants de Château-Landon passaient en effet pour être très-satyriques. On retrouve ce proverbe : La moquerie de Château-Landon, parmi ceux qui composent la pièce intitulée De l’Apostoile, et qu’a publiés et commentés M. Crapelet (Paris, grand in-8o, 1831). On lit également dans Les miracles de sainte Geneviève (voyez mon édition de ce mystère dans mon 1er volume de Mystères inédits du 15e siècle, page 263), à propos d’un certain Tiébault, grand faiseur de mauvaises plaisanteries :
    Il fut né à Chasteau-Landon,
    Sire, pour Dieu ne vous desplaise ;
    Jamais il ne dormiroit aise
    S’il ne moquoit : c’est sa nature.
    On trouve encore dans un petit recueil de Contes populaires, traditions, croyances superstitieuses, proverbes et dictons applicables à des villes de la Lorraine, recueillis par M. Richard, bibliothécaire de Remiremont, le proverbe suivant, rimé ou à peu près :
    Château-Landon, petite ville mais de grand renom :
    Personne n’y passe qui n’ait son lardon.
    Du reste, la plupart du temps, au moyen âge, les villes comme les personnes avaient chacune un sobriquet. C’est ainsi qu’on disait : les moqueors de Dijon, li buveors d’Aucerre, li jureors de Baiex, li larron de Mascon, etc.
  2. Ms. 7633. Var. Charja. — Ms. 7615. Var. Enseiga, pour enseigna.