Page:Rutebeuf - Oeuvres complètes, recueillies par Jubinal, tome I, 1839.djvu/487

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
455
ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

C. 45.), et, quand on présentait à ce prince un testament en faveur des églises, pour être confirmé par lui selon l’usage, ordinairement il le déchirait en disant que les richesses de l’état avaient passé dans l’Église, que le trésor royal en était appauvri, et que les évêques, usurpant les égards dus au souverain, étaient les seuls qui régnassent véritablement dans le royaume. (Aiebat enim plerumque : « Ecce pauper remansit fiscus noster ; ecce divitiæ nostræ ad ecclesias sunt translatæ. Nulli penitùs, nisi soli episcopi, regnant. Periit honos noster, et translatus est ad episcopos civitatum. » Hæc aiens assiduè, testamenta quæ in ecclesias conscripta erant plerumque disrupit.)

Par un autre abus, qui fut la suite du premier et qui ne servit qu’à le continuer encore, le clergé fit de ces testaments en faveur des pauvres une obligation et une loi. Au lieu d’une exhortation comme avant, ce fut une injonction qu’on fit au malade : s’il refusait de s’y soumettre, l’absolution et le viatique lui étaient refusés, et, regardé d’avance comme un réprouvé qui renonçait au salut de son âme, traité comme coupable de suicide, on le privait après sa mort de la sépulture en terre sainte. (Voyez Ducange, au mot Intestatio.)

On alla encore plus loin : on prescrivit à chaque malade la somme qu’il devait laisser ; elle fut fixée par les conciles à la dixième partie, et dans la suite au quart de ses biens.

Un concile de Narbonne, en 1227 (Labbe, conc. tome XI, page 305), un d’Arles, en 1275 (Hardouin, conc. tome VII, page 728), un d’Avignon, en 1282 (idem, page 882) réglèrent que les testaments ne pourraient se faire qu’en présence du curé, ou d’un autre prêtre quand le curé serait absent. Quiconque manquait à ce règlement était privé de la sépulture ou terre sainte, et l’on interdisait l’entrée de l’église au notaire qui avait reçu le testament. Dans le cas où le malade n’aurait pu faire venir un prêtre, un autre concile d’Avignon, tenu l’an 1326, ordonna que le notaire serait tenu, dans la huitaine, de communiquer le testament à l’évêque, ou à son official, ou au curé. Par un concile d’Alby, année 1254. il fut réglé que le testament serait lu publiquement