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NOTES

Mès cele tost l’en a fors mis
Qui n’oblie onques ses amis.
Venez véoir le riche tret
Que la mère Dieu si a tret :
Au déable a fet tel eschec
Que ce qu’il tenoit en son bec
A-il lessié par fine[1] force.
La mère Dieu, de qui est or ce,
Jeue si bien quant ele deingne,
Par un seul tret le jeu gaaingne.
Maint gieu perdu a gaaingnié,
Et s’a maint bon tret enseingnié
A ceus qui à lor jeu l’atraient.
Mult tost arrière s’en retraient
Li déable quant il la voient.
A cest chétif ici avoient
Par lor guile guilée s’âme ;
Mès, dès qu’au jeu vint Nostre-Dame,
I. si bon tret li ensengna
Quanqu’ot perdu regaaingna.
Dès que son bon corage vit
Si soutivement son jeu porvit
Qu’il retrouva par .i. seul tret
Quanqu’il avoit devant mestret.

« Venez véoir sanz délaiance
Com grant chose est de pénitance
Et comme ele a grant efficace ;
Venez véoir com a grant grâce
Et comme est douce au Sauvéor[2]
Chaude lerme de péchéor ;
Venez véoir la chaude lerme
Com frutefie à l’âme, et germe
Bone semance et bone graine ;
Venez véoir com l’âme a graine
Et comme elle en a grant profit ;
Venez véoir com desconfit
L’âme l’ordure de péchié.
Vos qui souvant avez péchié,
Chaudes lermes plorez souvant,

  1. Ms. 6987. Var. Vive.
  2. Les quatre vers suivants manquent au Ms. 6987.