Page:Ryner - L’Homme-fourmi, Figuière.djvu/53

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Je devais mesurer de six à sept millimètres.

Plusieurs n’avaient que trois millimètres, tandis que certaines fourmis à grosse tête atteignaient jusqu’à douze millimètres.

Ces différences de taille n’établissaient aucune hiérarchie sociale, ne nous divisaient pas en castes commandeuses et obéisseuses. Chacune de nous travaillait, de son côté, comme il lui convenait, pour le bien de toutes. Si une œuvre entreprise ou un projet exigeait l’effort concerté de plusieurs, on demandait l’aide fraternelle des premières rencontrées, grandes ou petites. Cependant quelques-unes travaillaient volontiers ensemble, étaient visiblement liées par une amitié particulière. Il y avait aussi des personnalités plus intelligentes et plus habiles auxquelles on accordait plus de confiance. Mais, quelle que fût la solliciteuse, l’aide était refusée bien rarement ; et alors on expliquait toujours en deux ou trois frôlements d’antennes — j’allais dire : en deux ou trois mots — qu’on ne croyait pas au succès de l’entreprise ou qu’on courait à un projet plus cher.

La merveille qui me frappa entre toutes fut celle de notre force musculaire. Étonnée par les fardeaux énormes que portaient avec aisance quelques-unes des travailleuses rencontrées, je me livrai sur moi-même à des expériences, d’abord timides et tremblantes. Mais peu à peu je m’enhardis en un orgueil croissant. Je déplaçai sans peine