Aller au contenu

Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ni nécessaires, le goût des honneurs ou de l’argent, par exemple. Ceux-là, il faut tout leur refuser, les détruire en nous par inanition. Car ils sont nos pires ennemis. Ils sont — quand les craintes de l’au delà, de la mort, de la douleur, ont disparu de notre cœur — nos seuls ennemis. Leur avidité est sans limites. Tout ce que tu leur accordes grandit leur force et leurs exigences. Nul bonheur n’est possible à qui reste esclave de ces odieux et ridicules besoins artificiels.

Il n’existe pas d’état indifférent. Pas de milieu entre le plaisir et la douleur. Ce prétendu milieu est le plus grand des plaisirs. Dès que mon corps ne souffre d’aucune douleur, mon esprit d’aucune agitation, je puis « disputer de félicité avec les dieux. » Je suis, en effet, à ces heures magnifiques, un être qui jouit de tout lui-même et de son eurythmique activité.

À l’origine, il n’y a de plaisirs que les plaisirs du corps ; des seules voluptés corporelles naissent les joies de l’esprit ; mais ces filles sont plus grandes que leurs mères. Le corps ne sent que l’instant présent ; l’esprit jouit du passé et de l’avenir. Quand le vase est sagement fermé, son trésor ne laisse perdre aucun souvenir heureux et j’y puis verser utilement mille prévisions joyeuses. Les voluptés