Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/140

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de n’être point trompé par des masques : j’écarte toute doctrine qui attente dans la pratique à la fraternité égale de tous les hommes ou à l’indépendance d’un seul.

Après l’effort initial pour libérer un individu, les individualismes de l’appétit et de la volonté de puissance deviennent des gloutonneries, font de leur adepte un doministe de plus en plus envahisseur, un esclavagiste, un ennemi sournois ou hautain des autres hommes.

D’autres individualismes de la sensibilité, les sereines doctrines d’Aristippe et d’Épicure, sans m’émouvoir d’amour pour tous mes frères, m’empêchent du moins de faire du mal à personne et me rendent l’ami de quelques-uns.

Calliclès et Nietzsche sont les misérables esclaves de leur soif de tyrannie. Le cyrénaïque, malgré son goût du plaisir, ne s’asservit point au plaisir. Il défend sa liberté intérieure et reste maître de soi : « Je possède Laïs, je n’en suis point possédé. »

Épicure est bien supérieur. À ce plaisir en mouvement qui nous heurte encore contre tant d’obstacles, il préfère la paix épanouie du plaisir en repos, cette absence de douleur et d’inquiétude qui permet de jouir de mon être et de son harmo-