Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/162

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tel oui sur la négation qui l’accompagnait. À ma nature et à la nature des choses, je commande aux mêmes conditions : par la connaissance et la souple obéissance.

Mais la nécessité, pour obtenir un progrès social, que des êtres nombreux deviennent des savants d’eux-mêmes et rayonnent un invincible héroïsme n’interdit-elle pas tout espoir. Voici peut-être, entre le progrès que je rêve et les progrès que je constate, une effroyable, une invincible différence.

Oui, je touche le gros nœud du problème.

Regardons-le d’aussi près que possible.

Tout progrès matériel a exigé, à ses débuts, l’union, dans un seul être, du savant et du travailleur. Les merveilleux ancêtres préhistoriques qui ont domestiqué les animaux, qui ont créé le blé, le vin, la rose, le navire, l’écriture, il a bien fallu qu’ils fussent ensemble les frémissants chercheurs, les tâtonnants réalisateurs. Aujourd’hui toute invention mécanique un peu extraordinaire n’exige-t-elle pas du savant qu’il construise ses premiers modèles, fabrique en bois ou en métal sa logique qui cherche et ses trouveuses hésitations ? Sa pensée fuyante ne se fixerait jamais dans assez de clarté si elle ne s’appuyait à des concrets immédiats et successifs ; elle s’exprime par les