Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/168

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Tolstoï me charme par la façon douce et ferme dont il affirme que chacun doit écouter la seule loi de sa conscience et qu’à elle seule il faut obéir, non aux paroles des prêtres, des dominateurs ou des livres. Mais je ne sais quoi de hâtif m’inquiète dans la façon dont il se précipite au fraternisme chrétien. Mais ses conseils paraissent souvent empoisonnés d’espérance objective. Mais, mauvaise note pour un sage, il restera jusqu’à la fin tourmenté et malheureux.

Sa pensée n’avait pas une puissance plastique suffisante, qui n’établit pas — ou qui établit si tard — entre sa parole et ses actes l’harmonie nécessaire. Il raccommoda quelques souliers, il traça quelques sillons ; il se montrait en vêtement de moujick et ne portait dans sa poche que quelques kopecks. Ces pratiques n’avaient-elles pas la flottante, l’inquiétante, la littéraire grâce des symboles plus qu’elles n’exprimaient la ferme beauté de la sagesse ? N’étaient-elles pas des procédés d’enseignement plus qu’une méthode de vie ? Sa fuite pour mourir pauvre et libre, que signifie-t-elle ? Folie mystique ou beauté, trop littéraire encore, qui veut enseigner aux disciples ce que le maître n’a pas eu la force de pratiquer ? Pour quiconque échappe à tout mysticisme et à toute manie