Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/187

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concevoir le commencement comme déterminé. Il me déplaît que le déterminisme, qui choque en moi tant d’autres sentiments et qui ne me promet que des satisfactions logiques, choque aussi un besoin logique.

Mais tout changement n’est-il pas un commencement ? Y aurait-il changement, s’il n’y avait rien de nouveau, si l’état actuel pouvait se ramener totalement à l’état antérieur ? Rien de nouveau au point de vue de la matière, je ne sais pas, je veux bien ; l’idée charme certaines de mes tendances. Mais du nouveau formel, certes. Et pourquoi la forme m’intéresserait-elle moins que la matière ? Pourquoi la statue m’intéresserait-elle moins que le marbre dans la carrière ? Si j’étais exclusivement déterministe, si je sacrifiais tout au besoin logique, au besoin d’expliquer totalement aujourd’hui, et par conséquent de montrer qu’il n’ajoute rien à hier, j’aurais, il me semble, le courage de nier tout changement et tout mouvement. J’affirmerais avec les Éléates l’unité et l’immuabilité. J’oserais ce coup désespéré de tout expliquer jusqu’au point de rendre tout inexplicable.

L’idée de commencement est une idée humaine à laquelle rien peut-être ne correspond dans l’insaisissable réalité. Mais il en est de même des idées