Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/20

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la considérer comme unique, à l’appeler Dieu et à lui croire une conscience — fût souverainement bonne et tout ensemble infiniment puissante. Dès lors, je soupçonnai, tremblant d’effroi et de vaillance, qu’un honnête homme est meilleur que les dieux. Les dieux, en ce qu’ils ont de bon, sont les Fils de l’Homme. La bonté est-elle autre chose qu’un rêve de notre cœur, cri de détresse chez les faibles, accueil et appel chez les meilleurs. La beauté est un rêve et une création de nos yeux. Et vous, Justice, Harmonie, ô noblesses de notre seul esprit… La Cause, contradictoire et aveugle, créatrice et destructrice, mère et tombe, n’est ni aimable ni haïssable tant que notre fantaisie ne la modèle pas à l’image de l’homme. Que nos rêves cessent d’être des mensonges et de construire sur la seule fuite des nuages. Qu’ils ne projettent plus, dieux et dogmes, mille ombres trompeuses. Que nos paroles et nos gestes ne se dirigent plus vers des fantômes. Délivrés de tous les fardeaux divins, écartons prières et blasphèmes et préparons-nous à l’action. À l’action héroïque et prudente qui sait ce que je veux, qui sait ce que je peux.

Ma méditation, qui semble m’éloigner des morts bien-aimés, m’en rapproche. Elle les invite à revivre pour se continuer et se mieux entendre