Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/214

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terais surtout que le respect de la sensibilité humaine est mille fois plus utile que les douteuses découvertes obtenues par de tels moyens. Sauver la vie de quelques hommes en détruisant dans l’homme le respect de la vie et la douce pitié, ce serait jeter un trésor pour ramasser un sou rouillé. À supposer, ce que je ne crois pas, que jamais vivisecteur m’ait apporté quelque ridicule avantage, je le comparerais au cuisinier qui, pour le rendre plus savoureux au palais de quelque ignoble gourmand, fait cuire vivant le crustacé. Il est un prix auquel je ne veux ni du plaisir ni du soulagement de mes douleurs.

L’artiste dont le but n’est pas uniquement de réaliser son rêve de beauté cesse, dans la mesure de ses préoccupations étrangères, d’être artiste. Souvent le prétendu artiste qui se targue de moralité ou d’immoralité est tourné tout entier vers son intérêt matériel. C’est un commerçant qui fabrique tel article pour telle clientèle ou c’est un politique qui veut plaire à tels détenteurs des emplois et des honneurs. Un marchand de sourires et un prostitué.

Le savant peut espérer que ses efforts aideront au progrès moral, croire que toute vérité découverte est un bien. Qu’il y ait naïveté ou non dans