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artificiels — que le dilemme soit absolu : prendre ce pain ou mourir.

Alors, que ferai-je ?

En toute sincérité, je l’ignore. Cela dépendra de la puissance de mon imagination à ce moment-là. Aujourd’hui, je me représente avec une malice rieuse la découverte d’un gros mercanti qui trouve son étal allégé. Ensuite je deviens sérieux. Cette brute va soupçonner quelqu’un, tendre quelque piège à quelque innocent. Et les innocents sont faits pour se prendre aux pièges. Quelles querelles, quelles erreurs judiciaires, quels drames peuvent sortir de mon heureux larcin. Décidément, je recule devant ce déclenchement de possibles maléfices ; je me déclare : Ce pain ne dépend pas de moi et me devient indifférent.

Seulement, voilà, aujourd’hui je n’ai pas faim ou je puis acheter ma nourriture. « Ventre affamé n’a pas d’oreilles. » A-t-il encore de l’imagination pour autre chose que pour sa prompte satisfaction ?

Eh ! bien, non. Je ne trouvais pas la solution propre à me satisfaire. Et pourtant elle est si simple. Je ne la trouvais pas parce que, comme presque tous les problèmes de casuistique, celui-ci est artificiel et mal posé. J’acceptais naïvement