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Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/224

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Quelle autre fin d’ailleurs ? Le bonheur d’autrui ? Sans doute, sans doute. Je lui attribue une valeur égale à celle que j’accorde au mien. La sympathie ne peut aller au delà. Il n’y a pas de raison pour que je me préfère qui que ce soit. Et je sais bien que je peux pour lui moins que pour moi, que je risque de me tromper pour lui plus que pour moi. Le conseil est plus hypothétique que tout à l’heure ; il s’appuie sur un monde de suppositions. Qu’il fasse la grosse voix et me vienne tutoyer : « Tu dois », il me fera rire. Je suis de ceux qui rient souvent en lisant les bouquins philosophiques. Même, s’ils sont une de mes lectures ordinaires, c’est que je suis ami de la gaieté. Pas de la trop grosse gaieté : j’ouvre peu les ouvrages de théologie.

Des fins plus générales que le bonheur d’un homme ? Oui, oui. Mais ma puissance s’y dilue, ou mon intelligence. Je ne réussis pas ce que je veux et je me pardonne parce que je ne sais plus ce que je fais. D’ailleurs, si universelle qu’on suppose une fin, dès que, comme un généreux canal d’irrigation, elle ne se divise pas en bras nombreux et en biens individuels, elle devient chimère et grimace.