Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les chemins qu’on y peut suivre sont en nombre infini ; plus la logique les trace rigides, plus ils vont s’écartant les uns des autres.

Maîtresse d’Euclide et d’Edgard Poë, je me livre à toi sans réserve lorsque, nonchalant du réel, je poursuis l’élégance des déductions qui s’enchaînent, ou lorsque, charmé d’un départ poétique, je te demande de transporter mon imagination à travers des régions imprévues.

Mais aujourd’hui je tente œuvre pratique. Je m’interdis toute aventure, tout voyage dans l’abstrait ou dans l’imaginaire. Charge-toi, Logique, du fardeau concret ; tourne, hésitante, autour de chaque petite lumière ; instruis dans toutes les directions ma tremblante inquiétude. Ne dépassons guère le frémissement des pénombres. Ne nous hasardons pas trop dans les obscurités fécondes en chutes. Il est, proches peut-être, des abîmes d’où l’on ne remonte point, d’où l’on n’aperçoit même plus la modeste clarté que nous tentons en quelque sorte d’élargir.

Logique, ne t’appellerai-je pas l’enfant prodigue ? Affirmer une chose, c’est rejeter et nier combien de choses… Que de chemins on supprime pour soi lorsqu’on adopte un chemin. Qui te suit avec une naïve confiance, ô aventureuse, veut tout