Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/247

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arrêter ni leur faire obstacle. Les choses qui ne dépendent pas de moi sont faibles, esclaves, sujettes à mille difficultés et à mille inconvénients. Le stoïcien, par un acte de volonté, appelle indifférentes toutes les choses qui ne dépendent pas de lui. Elles ne sont ni de vrais biens ni de vrais maux et, si je les prends pour des biens ou pour des maux, je trouve partout des obstacles, je suis affligé et troublé, je me plains des choses et des hommes. Surtout, je deviens esclave du désir et de la crainte.

Pour s’affranchir complètement, il faut arriver à penser comme Épictète. Évitons cependant certaine façon étroite de comprendre les positivismes. Mon positivisme rationaliste ne m’empêche pas de jouir des poèmes et des rêveries métaphysiques, ne m’induit pas à prendre les limites de l’affirmation scientifique pour les limites de la pensée. C’est seulement quand je dois affirmer que je fais appel à mon éducation positiviste. Son stoïcisme n’empêche pas Spinoza de goûter les faciles jouissances épicuriennes et peut-être même, quand il fume sa pipe, de dépasser en souriant leurs limites. Positivisme et stoïcisme sont les imprenables citadelles intérieures où je veux être sûr de pouvoir me réfugier aux heures dangereuses, hors desquelles