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Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/60

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avec la permission de ses chefs n’est pas un voleur. Notre unique devoir comme notre intérêt, c’est de maintenir le prince. L’unique devoir du prince, c’est de se maintenir. La formule fameuse du vénitien Sarpi paraîtrait bien faible à Hobbes : « La première justice du prince est de se maintenir. » Pour Hobbes, cette justice-là n’est pas la première ; elle est la seule.

Si elle ne m’apprend pas autre chose, la lecture de Machiavel et de Hobbes m’enseigne que faire dépendre la morale de la politique, c’est détruire toute vie éthique. À chaque instant, en lisant ces deux écrivains, je suis poursuivi par la formule de saint Augustin : « Qu’est-ce qu’un gouvernement, si vous en ôtez la justice ? Un grand brigandage. »

Faut-il donc renverser le rapport et, comme le veut Platon, fonder la politique sur la morale ?

La politique platonicienne revêt, dans Platon lui-même, deux formes bien différentes : libertaire et pédagogique dans La République, elle devient despotique dans Les Lois. Beaucoup de réformateurs sociaux me paraissent ressembler à Platon par cette contradiction essentielle ; dans le rêve, on parle au nom de la liberté ; dans l’application,