Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/61

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on est contraint de recourir aux procédés les plus tyranniques.

La République trace le modèle de l’État idéal, « l’idée » de l’État. Platon en écarte tout élément empirique, les lois aussi bien que les intérêts. Les lois lui paraissent toujours inutiles : si l’État est sain, il n’en a pas besoin ; s’il est gâté, elles ne remédient à rien. La cité de La République ne peut être maintenue que par l’éducation ; la politique ici se réduit à une pédagogie.

Dès que l’utopiste veut bâtir sa cité quelque part, il est forcé de tenir compte des éléments empiriques ; il ne voit plus le moyen d’instituer la justice sans l’imposer. Il sent l’insuffisance de l’éducation et il promulgue des lois. Pour conserver sa société vertueuse, le voici entraîné à l’enfermer dans un rempart de despotisme. Dans Les Lois, le gouvernement, représentant armé de la conscience, ne laisse à l’individu aucune liberté d’action, de sentiment ou de pensée. Une réglementation, minutieuse comme la règle d’un couvent moderne, envahit jusqu’aux replis les plus secrets de la vie privée. Elle s’inquiète des relations conjugales, et c’est la loi qui assortit les mariages. Le désir, d’après Platon, rapproche les êtres semblables. Il faut lutter contre cette tendance natu-