Aller au contenu

Page:Ryner - La Sagesse qui rit, 1928.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il lui est dû dans l’histoire de la sagesse une place peut-être égale à celle du stoïcisme.

À le regarder superficiellement, l’épicurisme est un système complet, une explication de l’univers aussi bien que de l’homme. Vu de près, il est une sagesse indépendante et il n’est qu’une sagesse. Sa physique, négligemment empruntée à Leucippe et à Démocrite, n’a pour l’épicurien qu’une valeur libératrice : elle doit purger l’esprit de toute crainte religieuse, déblayer en quelque sorte le terrain sur quoi se construira le bonheur. Quant aux dieux, peu importe qu’Épicure affirme de bonne foi leur existence ou que soit juste l’accusation d’athéisme portée contre lui par les populaces païenne et chrétienne. Heureux et paresseux, négligents des choses humaines, épicuriens de l’Olympe qui s’inquiètent de nous aussi peu que l’épicurien du jardin s’inquiète de l’État, ses dieux sont indifférents au sage. Tout lien est coupé entre la conduite de l’homme et la théologie.

Autant que de toute métaphysique à conséquences morales, l’épicurien est affranchi de toute politique. Pour les fonctions civiques et les honneurs sociaux, cet homme libre professe le plus profond mépris. Épicure écrit avec dédain : « Le peuple n’approuve pas ce que je sais et ce que