Page:Ryner - Le Présent du berger, paru dans Le Radical, 17 mai 1914.djvu/17

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Bernard jette le filet. Jamais richesse plus lourde ne fut livrée par la mer généreuse.

Son âme est un cri où se mêlent l’éblouissement présent et les souvenirs éblouis d’Évangile :

— La pêche miraculeuse ! C’est la pêche miraculeuse !

Mais le Christ, un peu oublié, fait entendre sa voix :

— Que feras-tu de ces poissons que tu ne peux manger ?

— Je les donnerai, Seigneur, je les donnerai à ceux qui ont faim.

Le Christ a l’air sévère maintenant comme lorsqu’il parlait aux Scribes et aux Pharisiens. Son doigt, qui semble fait de ténèbres, touche le bras miraculeux qui disparaît. Bernard se trouve manchot, et vieux, et faible. Et le Christ interroge avec l’accent terrible qu’il aura sans doute au jugement dernier :