Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/26

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qu'elle prétend résoudre. Pour définir un mot, il te faut plusieurs mots. Nous étions en désaccord sur un terme, nous voici en désaccord sur deux au moins. Il te faut encore deux mots au moins pour définir chacun des termes de ta première définition. Te voici quatre mots à définir, puis huit. Te voici, dira quelqu'un, de l'occupation pour toute ta vie. Antisthène ne dit pas comme ce quelqu'un. Antisthène sait que tu ne pourras pousser très loin ta ridicule tentative. Car les mots d'un langue ne sont pas en nombre infini. Bientôt tu définiras par des mots déjà employés, tu définiras par ce qui est à définir, tu éclaireras par ce que tu viens de confesser avoir besoin d'éclaircissement. Ainsi tu tourneras dans un cercle.

Ou bien tu t'arrêteras au bord d'un abîme. Tu seras arrivé à quelque mot trop général pour que tu le puisses faire entrer dans un genre plus vaste. Tu t'arrêteras alors par nécessité et tu auras marché longtemps pour rien. A mieux dire, tu te seras fatigué pour le contraire de ce que tu voulais. Car plus le mot est général, plus il est vide et obscur, moins il répond à des choses que tu aies éprouvées. Par exemple, tu as voulu définir l'homme. Après un long chemin, de plus en plus ténébreux, tu arrives à la notion d'être. Là il est nécessaire que tu t'arrêtes. Or tu sais moins ce que c'est que l'être que ce que c'est que l'homme.

Et tout ceci, au second livre du Sathon, est dit prudemment contre les seules définitions des philosophes non contre les définitions des géomètres. Le géomètre ne dit pas ce qui est mais ce qu'il rêve.