Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/27

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Il sait bien qu'il n'y a pas dans la nature de cercle ou de ligne sans largeur. Rien n'empêche que tu définisses ton rêve, puisque tu y mets ce que tu veux et seulement ce que tu veux. Aussi les raisonnements du géomètre sont valables tant qu'ils parlent des rêves du géomètre. Dès qu'ils veulent, en dehors de l'esprit du géomètre, s'appliquer aux choses, il cessent d'être complètement valables.

Voilà quelques-unes des vérités qu'Antisthène établit aux deux premiers livres du Sathon.

Mais le troisième livre confond encore plus complètement, s'il est possible, les disputeurs.

Même si tu parvenais à définir un mot pour toi, tu ne l'aurais nullement défini pour moi. Aucun mot n'a le même sens pour deux hommes. Si tu ne sais ces choses, c'est que tu n'as jamais songé à ce que signifie un mot soit pour toi, soit pour moi, soit pour un autre.

Ou bien un mot ne signifie rien pour toi, ou bien il te rappelle une ou plusieurs choses éprouvées par toi. Quand tu prononces le mot homme, tu résumes tout ce que tes sens, ta raison et peut-être ta fantaisie ont expérimenté concernant l'homme. Mais je n'ai pas fait les mêmes expériences que toi. Je n'ai pas rencontré exactement les mêmes hommes ; je ne les ai pas connus dans la même mesure, de la même façon, ayant avec eux exactement les mêmes rapports et me trouvant exactement dans le même état d'esprit. S'il te semble que deux frères jumeaux qui ont toujours vécu ensemble doivent donner au même mot le même sens, tu ne m'as pas encore compris. Puisqu'ils sont deux, quand ils voient ce que tu appelles une