Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/33

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en paroles magnifiques et rythmées pour les mêmes raisons que les loue le vulgaire.

— Peut-être il a enfin compris certaines vérités. Réjouissons-nous donc et répétons le proverbe phrygien : Mieux vaut tard que jamais.

Mais Gorgias, secouant sa tête chenue :

— Je suis sans doute trop vieux pour entendre Platon chanter une nouvelle palinodie. Toi, mon Antisthène, qui es encore jeune, souviens-toi de moi chaque fois qu'il se contredira avec impudence.

Gorgias mourut peu de jours après cet entretien. Je me suis rappelé souvent les paroles de Gorgias chaque fois que Sathon a vanté le plaisir comme un ingrédient nécessaire de la félicité. Et je me suis rappelé les paroles de Gorgias lorsque, à la fin du dialogue intitulé Ménon, j'ai lu, écrit par le même stylet que la juste condamnation de tous les hommes politiques un emphatique éloge des hommes d'état athéniens.

Parce que le peuple et les grands, ces deux populaces, méprisent également les sophistes et leur sagesse, l'énorme Sathon et le capitaine de cavalerie Xénophon se sont appliqués à séparer Socrate des sophistes. Nul mensonge plus éhonté.

Parmi les sophistes, tous n'étaient pas de mœurs pures. Mais ce n'est pas un Sathon ou un Xénophon, et ce n'est pas le peuple, et ce ne sont pas les grands qui ont le droit d'accuser qui que ce soit à ce sujet. Médecins, guérissez-vous vous-mêmes.

Gorgias, d'ailleurs, n'était pas, il s'en faut, le seul honnête homme parmi les sophistes. La vertu de Prodicos, par exemple, était admirable. Socrate l'aimait.