Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/38

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Mélétos. Mais, à cause des mensonges de Sathon et de quelques autres, ils négligent de jeter la honte vers le véritable et large but : la cité. Car il est vrai que Socrate, obéissant à la nature ou, comme il disait, aux lois non écrites, violait noblement les lois écrites et les ordres de la cité. Les lois de la cité se sont vengées honteusement, selon leur coutume.

Moi aussi je méprise Anytos, Mélètos et Lycon. Mais, je les méprise pour leur véritable crime : parce qu'ils ont obéi, obéi jusqu'à devenir des meurtriers, aux lois artificielles et menteuses de la Cité. Je les méprise d'avoir été des citoyens, non des hommes.

Antisthène le chien, faisant sa fonction de chien de Socrate, a aboyé contre Mélétos, contre Anytos, contre Lycon ; il ne cessera d'aboyer contre ces misérables qui furent des citoyens, non des hommes. Il les a mordus quand il a pu les mordre. J'ai contribué à faire exiler Anytos et à faire condamner à mort Mélétos.

Peut-être Antisthène le chien a eu tort. Peut-être Socrate me dirait : « Le mal que tu as fait à Mélétos, ajoute-le, loin de l'en retrancher au mal que Mélétos m'a voulu faire ». J'avais entendu souvent de belles paroles de Socrate qui auraient dû me faire entendre, après sa mort, des paroles telles. Hélas ! mes oreilles étaient encore trop jeunes pour de telles paroles.

Je me croyais l'ami de Socrate en le vengeant de ses ennemis. Dans ma vieillesse, je suis plus ami de Socrate et de ce qu'il voulait. Je comprends mieux sa pensée et je regrette d'avoir poursuivi des hommes qu'il n'eût pas poursuivis. Je le regrette d'autant