Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/43

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en cosmos et en bonheur ton chaos douloureux.

Ce dieu intérieur nous enseigne les lois non écrites, nous arrête au bord des actions mauvaises, nous conseille de désobéir aux lois de la Patrie dès qu'elles sont contraires aux lois non écrites. On sait avec quelle attention scrupuleuse Socrate écoutait son daïmon et lui obéissait. Mais on a conté à ce sujet à ce sujet mille fables ridicules. A en croire le vulgaire des ignorants et le vulgaire des philosophes, Socrate serait un vaniteux qui s'imaginait être seul à avoir un daïmon. Or Socrate ne s'est jamais cru privilégié en rien et il savait que quiconque écouterait avec le même soin que lui son daïmon deviendrait bon et heureux comme lui.

Je lui demandai un jour si en cas de désaccord, il obéirait de préférence à l'Esprit, ordonnateur du chaos extérieur, ou au daïmon, ordonnateur du chaos intérieur. Il me répondit :

— Peut-être ta question n'a aucun sens. Car, si l'Esprit a quelque chose à me dire, comment pourra-t-il me le dire ?

— Je ne sais, Socrate.

— Crois-tu qu'il puisse m'apparaître sous la forme d'un homme et me parler avec une bouche ?

— Je ne crois pas cela, Socrate.

— Crois-tu qu'îl puisse emprunter la voix d'un prêtre ?

— Le prêtre m'a toujours paru le pire ennemi de l'Esprit.