— Ce n'est donc pas du dehors que l'Esprit me parlera ?
— Il y a apparence, en effet.
— Il me parlera donc au dedans de moi-même ?
— C'est probable.
— Mais, la voix divine que j'entends en moi, ne sais-tu pas que je l'appelle mon daïmon ?
— Je le sais, Socrate.
— Si donc l'Esprit a quelque chose à me dire, c'est mon daïmon qui me dira cette chose.
Je lui demandai encore :
— Chaque homme a-t-il comme toi un daïmon pour le conseiller.
Il me répondit :
— Oui, mais tous ne savent pas l'écouter.
— D'où vient, Socrate, que tous ne savent pas l'écouter ?
— Quand tu es sur l'agora, mon Antisthène, parmi les rumeurs de la foule, entends-tu le souvenir de ma voix aussi nettement que lorsque tu marches seul sur la route du Pirée ?
— Moins nettement, Socrate.
— Et les voix qui sont en toi, où les entends-tu mieux, dans la solitude ou sur l'agora ?
— Dans la solitude.
— Mais la plupart des hommes ne vivent-ils pas toujours comme sur l'agora ?
— Je ne sais ce que tu veux dire, Socrate.
— Ne sont-ils pas toujours attentifs à la voix de la coutume, à la voix de la loi, aux cris d'approbation ou de blâme de la multitude, aux promesses