Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/45

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et aux menaces des magistrats, aux paroles vides des prêtres et des oracles ?

— Ils sont toujours attentifs à quelqu'une de ces choses, Socrate.

— Puisque tu sais cela, comment ignorerais-tu quels grands bruits couvrent pour eux la voix douce et profonde de leur daïmon ?

— Je ne l'ignore plus, Socrate. Il faut, pour entendre son daïmon, fermer les oreilles aux bruits du dehors. Désormais donc, pour entendre la vérité qui est en moi, je fermerai mes oreilles aux mensonges de la Cité, des lois et des coutumes.

Nous gardâmes le silence quelques instants car je songeais à ce que je venais de dire, et ce que je venais de dire me semblait plus vrai à mesure que j'y songeais davantage. Socrate souriant me regardait songer. Et il regardait autour de nous ceux qui songeait comme moi. Mais, quelqu'un ouvrant la bouche, Socrate lui fit signe d'attendre.

Et je voyais ces choses comme dans un rêve.

Je sortis enfin de mon rêve, demandant :

— 0 Socrate, la divinité que tu appelles mon daïmon, n'est-ce point celle que j'appelle tantôt ma conscience, tantôt ma raison.

— Tu l'as dit, mon Antisthène ; et le fils de Phænarète vient de réussir sans peine un de ses meilleurs accouchements.

Or Xénophon était là, et Phédon, et Sathon. Leurs oreilles entendirent comme les miennes. Si Phédon et Xénophon avaient le même esprit que moi, si Sathon avait le même bon vouloir et la même bonne