Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/46

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foi que moi, ils auraient compris comme j'ai compris.

Mais la troisième accusation est-elle juste et Socrate corrompait-il la jeunesse ?

Les trois accusations sont injustes comme la loi. Les trois accusations sont vraies aux yeux des tyrans qui soutiennent les lois et des imbéciles qui croient à la bonté des lois. C'est pour quoi elles déshonorent, non point les seuls accusateurs et les seuls juges qui condamnèrent, mais quiconque par calcul tyrannique ou par sottise servile vante la loi, quiconque commande au nom de la loi ou obéit aveuglement à la loi.

Socrate, comme tous les sages, parlait contre la loi et contre la cité. Ceux donc qui aiment la loi et la cité doivent affirmer que Socrate et la sagesse corrompent la jeunesse. Longtemps avant Anytos, Mélétos et Lycon, Aristophane le comique avait porté cette accusation contre Socrate.

Mais quelqu'un peut-il aimer la loi et la Patrie pour elles-mêmes et d'un cœur sincère ? Socrate soutenait le contraire.

Il disait, un jour, à Xénophon, qui ne comprenait point :

— Ne cherche jamais à connaître les sentiments du peuple.

— Pourquoi, ô Socrate ?

— Parce que tu ne cherches pas dans les vagues tumultueuses de la mer lorsque tu désires boire.

— Que veux-tu dire, Socrate ?

— La mer ne contient pas d'eau qui puisse étancher ta soif. Tu ne trouveras dans le peuple,