Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/83

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lui découvrait lentement — mais il semblait lui faire découvrir par lui-même ces vérités — quelques propriétés du carré. Il finit par lui enseigner, quand un carré est donné, sur quelle ligne se construira un carré double.

Je n'ai pas besoin de copier sur mes tablettes ces lentes habiletés. Sathon les a publiées dans un dialogue connu de tous qui s'appelle Ménon ou de la vertu et où la vertu tient moins de place que la géométrie. Mais, selon sa coutume odieuse, il a prêté à Socrate, afin de leur donner crédit, des paroles de Sathon. Et il fait employer par Socrate une méthode qui ressemble à la véritable maïeutique comme la grimace accrocheuse d'une courtisane ressemble à un sourire d'amour.

Tous écoutaient avec ravissement, à l'exception de Socrate et de moi.

Socrate écoutait avec inquiétude. Ainsi on regarde un enfant, déjà trop grand pour un tel jeu, jouer quelque jeu ingénieux, absurde et dangereux. Et certes Socrate n'eût jamais pris part lui-même à des amusements aussi artificiels et qui, pour le vrai philosophe, ne laissent pas d'être ridicules.

Quand Sathon eut fini d'interroger Manès, plusieurs s'écrièrent :

— Platon est un autre Socrate !

Mais Socrate, dont tout le visage riait :

— Je n'ai pas la présomption de me comparer à l'ingénieux Platon. Je ne suis qu'un accoucheur. J'aide l'esprit en travail à se délivrer de l'enfant qui le tourmente. Platon est un thaumaturge : il accouche des femmes qui ne furent point fécondées ; il