Page:Ryner - Les Véritables entretiens de Socrate, 1922.djvu/90

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mais le sourire de Socrate gardait toujours on ne sait quoi de profond et de viril :

— Explique-moi mon bonheur et quel mal tu essaierais de me faire, si tu avais ce que Platon et Aristophane appellent glorieusement « la gloire d'être citoyen d'Athènes. »

— Je te traînerais, Socrate, devant les héliastes et je te convaincrais sans peine d'introduire dans la cité des dieux nouveaux.

— Tu me convaincrais d'autant plus facilement que je me garderais de nier cette vérité. Montre toutefois si tu sais d'une façon véritable quels dieux nouveaux j'introduis à Athènes.

— Je ne sais si tu en introduis d'autres. Mais certainement celui que tu as appelé hier « le dieu de Socrate » et qui interdit que tu acceptes l'argent qui vient à toi de lui-même, ce dieu est étrange et nouveau en Grèce comme en Afrique. Ni à Cyrène ni à Athènes, je ne connais un dieu qui méprise l'argent. Les plus sévères parmi les dieux d'Athènes ou de Cyrène t'auraient conseillé  : « Si tu ne veux point pour toi l'argent que t'offre avec justice ton disciple Aristippe ; si tu trouves ton manteau rapiécé trop jeune pour être remplacé et si tu n'as, en. un mot, aucun de ces besoins qu'on satisfait avec de l'argent, prends pourtant ces vingt mines. Puis, en exprimant l'aimable regret qu'elles ne soient pas plus nombreuses, tu les porteras dans mon temple. Mes prêtres, je te l'assure, sauront leur trouver quelque usage. En échange, je t'accorderai, généreux Socrate, les biens que je puis donner sans qu'il en coûte rien à mes prêtres. Je ferai tendre