Elle était jolie comme tout ; à ceux qui aimaient les blondes, elle paraissait blonde, tandis que ceux qui préfèrent les brunes la trouvaient aussi brune qu’elle semblait blonde aux autres ; mais elle rebutait toujours Jean-sans-Peur, et quand il voulait l’embrasser, elle le repoussait avec de dures paroles.
Il en était bien navré, et, pour se distraire, il allait à la chasse ; un jour qu’il chassait dans la forêt où il avait trouvé la petite fille, il vit devant lui un homme tout en blanc : c’était son grand-père. Jean-sans-Peur lui dit :
— Qui t’a envoyé ici ?
— Je n’y suis pas venu seul, répondit le fantôme.
Aussitôt on vit paraître d’autres hommes en blanc.
— Ce sont des morts, dit Jean-sans-Peur sans s’émouvoir.
— Ce sont mes collègues, répondit le fantôme.
— Hé bien ! dit Jean-sans-Peur, s’ils ne s’en vont pas, je vais leur tirer un coup de fusil.
Dès qu’il eut tiré, ils disparurent, et jamais il ne les a revus.
Quand il fut de retour chez lui, la petite fille l’appela ; elle avait alors dix-huit ans :
— Jean-sans-Peur, tu sais où tu m’as trouvée ; dans deux jours d’ici, je vais mourir ; promets-moi de me porter au pied de l’arbre et de m’y enterrer.
— Je te le promets, répondit-il.
Deux jours après, elle mourut, et Jean-sans-Peur dit à son aide-de-camp de lui aider à la porter dans la forêt ; ils lui creusèrent une fosse, et, comme ils allaient la mettre en terre, ils entendirent frapper dans la châsse :
— Ah ! s’écria Jean, elle n’est pas morte.
Il courut à la rivière pour puiser de l’eau dans son casque ; pendant qu’il y était, on entendit un grand fracas, et la châsse se brisa en mille morceaux, quand Jean-sans-Peur revint, il trouva son aide-de-camp baigné dans son sang et blessé à mort.