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MARIE DE ROMIEU



Un sujet familier aux femmes écrivains c’est précisément, l’apologie des femmes et Marie de Romieu, qui vivait au xvie siècle, dans le Vivarais, ne doit d’être venue jusqu’à nous qu’à la particulière vivacité de ses revendications féministes.

Nous ne savons rien de la vie de cette poétesse, sinon qu’elle débuta en répondant à un de ses frères, Jacques de Romieu, gentilhomme et secrétaire du roi, qui, pour faire sa cour à un vieil oncle, Périnet des Auberts avait écrit une satire contre les femmes.

Marie voulut prouver la « prééminence de la femme sur l’homme » et elle publia un « brief discours en vers » dans lequel elle s’efforce d’établir que « l’excellence de la femme surpasse celle de l’homme » surtout en candeur et bonne foi. »

En dehors de cette dissertation poétique, les œuvres de Marie de Romieu publiées en 1581, contiennent de nombreuses pièces détachées, églogues élégies, odes, sonnets, hymnes, étrennes, anagrammes, énigmes, etc.

De tous ces morceaux, assez médiocres, une imitation d’Anacréon est à citer. Dans cet hymne de la Rose, Marie de Romieu a de la grâce et de la naïveté.


HYMNE DE LA ROSE


À M. FRANÇOIS DE LA ROSE


Je veux chanter ici la beauté de la rose
Qui de toutes les fleurs la beauté tient enclose.
Puis la rose je veux à la Rose donner,
À toi Rose, qui peux tout un monde étonner.
Et ravir les esprits d’un singulier bien dire,
Qu’à ta volonté doctement les attire.
Au dedans d’un jardin s’il y a rien de beau,
C’est la rose cueillie au temps du renouveau :
L’Aube a les doigts rosins ; de roses est la couche
De la belle Vénus, et teinte en est sa bouche :
En Paphos, sa maison est remplie toujours
De la suave odeur des roses, fleur d’amour.
La rose est l’ornement du chef des damoiselles.
La rose est le joyau des plus simples pucelles :
De roses est semé des Charités[1] le sein
Et de leur doux parfum le ciel lui-même est plein ;
Bacchus, ce deux fois né, ce Bassar[2] vénérable,

  1. Des grâces.
  2. Un des surnoms de Bacchus.