Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/366

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téger Caroline pendant le reste de sa vie. Il s’entendit appeler par le curé, il entra et fut effrayé de la contraction des traits de Gribouille.

« Il est temps, dit le curé, je vais chercher notre pauvre Caroline. Gardez-le, son âme est pure, et il semble avoir retrouvé la clarté d’intelligence qui lui manquait. »

Le brigadier s’assit près de son ami, qui lui tendit la main en souriant :

« Mon ami, dit le mourant, je vais mieux ;… j’étouffe moins ; il s’est fait dans ma tête je ne sais quel travail ; je sens mieux encore le bonheur de mourir pour vous ; il me semble que je rends à ma chère Caroline tout ce qu’elle a fait pour moi… La pensée de la laisser entre vos mains me rend douce la séparation,… qui ne sera pas longue,… car vous viendrez me rejoindre près du bon Dieu, et près de maman, qui m’attend… Restez là, près de moi, mon ami,… ne me quittez plus ;… ce ne sera pas long. »

Le brigadier prit les mains que lui tendait Gribouille et les serra dans les siennes. Une demi-heure s’était à peine écoulée depuis le départ du curé, quand la porte se rouvrit, et Caroline, pâle, baignée de larmes, entra précipitamment et, se jetant à genoux près du lit de mort, entoura son frère de ses bras tremblants. Ses sanglots l’empêchaient d’articuler une parole. Gribouille lui rendit ses baisers et lui dit en souriant :

« Ne pleure pas, Caroline ; je suis content, je