Page:Ségur - La soeur de Gribouille, Hachette, 1886.djvu/385

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difficile l’œuvre de charité que je voulais faire ; et, pour ne pas provoquer votre humeur et vos propos injurieux, je me bornerai à garder pendant quinze jours seulement la pauvre Caroline ; au bout de ce temps je suivrai votre conseil, et je la remettrai aux mains du brave brigadier qui a été, non pas l’assassin, comme vous le dites, mais l’ami du pauvre Gribouille. »

Les deux femmes levèrent sur le curé des yeux étonnés. Nanon voulut s’excuser, mais le curé sortit sans l’écouter.

« Eh bien ! en voilà d’une autre ! M. le curé qui va faire une inconvenance pareille ! qui va lâcher une jeune fille au travers d’une bande de gendarmes ! s’écria Nanon dès que la porte fut refermée.

— Et à qui la faute ? cria d’une voix aigre l’amie Phrasie. N’est-ce pas vous qui le vouliez tout à l’heure ? Il faut croire que M. le curé la trouve plus en sûreté avec des hommes braves et honnêtes que près d’une méchante langue comme vous.

nanon.

Méchante langue ! Ah ! c’est comme ça ! ah ! vous vous permettez de m’apostropher avec votre langue de vipère ? Vous ne l’emporterez pas en paradis, allez ! Jamais plus, au grand jamais, je ne vous appellerai pour veiller les morts !

phrasie.

Et qu’est-ce que ça me fait, moi ! Voilà-t-il pas un beau profit de passer une nuit en compagnie d’un