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Page:Ségur - Les petites filles modèles.djvu/107

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Enfin elle put articuler : « Ma… poupée… ma… poupée…

— Qu’est-il donc arrivé ? demanda Mme de Rosbourg ; Marguerite… parle… je t’en prie.

— Ma… poupée… Ma belle… poupée est restée… dans… la forêt… au pied… d’un arbre… Ma poupée, ma pauvre poupée ! »

Et Marguerite recommença à sangloter de plus belle.

« Ta poupée neuve dans la forêt ! s’écria Mme de Rosbourg. Comment peut-elle être dans la forêt ?

— Je l’ai emportée à la promenade et je l’ai assise sous un gros chêne, parce qu’elle me gênait pour cueillir des fraises ; quand nous nous sommes sauvées à cause de l’orage, j’ai eu peur du tonnerre et je l’ai oubliée sous l’arbre.

— Peut-être le chêne l’aura-t-il préservée de la pluie. Mais pourquoi l’as-tu emportée ? Je t’ai toujours dit de ne pas emporter de poupée quand on va faire une promenade un peu longue.

— Camille et Madeleine m’ont conseillé de la laisser, mais je n’ai pas voulu.

— Voilà, ma chère Marguerite, comment le bon Dieu punit l’entêtement et la déraison ; il a permis que tu oubliasses ta pauvre poupée et tu auras jusqu’à demain l’inquiétude de la savoir peut-être trempée et gâtée, peut-être déchirée par les bêtes qui habitent la forêt, peut-être volée par quelque passant.