Page:Ségur - Témoignages et souvenirs.djvu/142

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elle avait consenti à le laisser s’engager. Le 1er chasseurs d’Afrique était alors en Crimée. Hélion de Villeneuve obtint sans peine son incorporation dans ce régiment, avec le privilège d’entrer dans un des escadrons de guerre sans passer d’abord par le dépôt, selon les règlements.

Une fois ce point décidé, il mit ordre à ses affaires temporelles et spirituelles ; et, prévoyant que peut-être il ne reviendrait pas de cette terre d’Orient, où l’entraînaient pourtant tous ses désirs, il écrivit son testament en ces termes :

« Au moment de partir pour une expédition dont il est possible que je ne revienne pas, je me considère comme en danger de mort, et je fais ici mon testament.

« Je meurs en bon chrétien, comme j’ai toujours tâché de vivre. Je remercie ma bonne et excellente mère du bonheur qu’elle m’a toujours donné, et lui demande pardon des chagrins que j’ai pu lui causer. Je lui laisse tout ce que je possède, en lui demandant de donner un souvenir de moi à mes sœurs. »

Après quelques dispositions en faveur de ses meilleurs amis, il ajoute :


« Je prie ma bonne mère de donner aux pauvres l’argent qui se trouve à moi chez M. S***, moitié à Nancy, moitié à Bargemont, demandant à ceux qui en profiteront de prier pour moi.

« Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Amen.

« Signé : Hélion de Villeneuve-Trans.
« Paris, le 28 mai 1855. »


Après avoir exprimé ses dernières volontés d’une façon si touchante, si simple et si calme en même temps, il fallut se décider à partir. Le moment, le cruel moment des