consentit à le voir, mais en particulier seulement, et trois fois l’apôtre de Jésus-Christ vint secrètement à Genève conférer avec le successeur de Calvin ; il l’ébranla, le convainquit, c’est un fait certain et qui résulte des paroles échappées à Théodore de Bèze lui-même[1], mais il ne put le convertir, car ce n’est pas de l’esprit, mais du cœur que vient la conversion. Il obtint néanmoins de lui un aveu remarquable. Lui ayant posé cette question : « Peut-on faire son salut dans l’Église romaine ? », le ministre, d’accord avec tous les chefs de la Reforme, avec tous les protestants qui veulent être logiques, répondit affirmativement ; il avoua même que l’Église romaine était l’Église mère.
Alors François de Sales lui posa cette seconde question, à laquelle ni lui, ni aucun protestant n’a jamais pu répondre d’une manière satisfaisante :
« Puisqu’on peut faire son salut dans l’Église romaine, pourquoi les calvinistes ont-ils versé tant de sang, afin d’établir leur religion en France ? Pourquoi tant de séditions et de révoltes, tant de guerres, d’incendies ? »
Et s’il eût vu se dérouler la suite des événements et des siècles, combien son argument eût été plus terrible encore et plus saisissant ? Pourquoi cette persécution incessante de l’Église catholique, partout ou le protestantisme est victorieux ? Pourquoi les supplices et les échafauds multipliés en Angleterre ? Pourquoi ce martyre même de l’Irlande pendant trois cents ans ? Pourquoi l’exil et la confiscation prononcés en Suède contre quiconque abandonne la religion luthérienne ? Pourquoi cette haine vivante et agissante de Rome, cette guerre de Bibles et de propagande, ce trafic scandaleux des cons-
- ↑ Voyez la Vie de saint François de Sales, par M. Hamon, curé de Saint-Sulpice.