tout du côté du Tyrol. On a devant soi des précipices immenses, des montagnes nues et désolées, sillonnées de nuages qui s’attachent à leurs flancs, et couvertes de neiges éternelles, et, au dernier plan, une vallée charmante, au fond de laquelle court comme un cheval furieux un torrent tout blanc d’écume.
À partir de ce moment et dans tout le reste du Tyrol, il nous parut que la nature prenait un caractère de grandeur et de majesté supérieur à tout ce que nous avions admiré jusque-là ; les montagnes sont plus sauvages encore qu’en Suisse, et les vallées plus spacieuses. C’est une contrée plus solitaire, plus simple les touristes ne l’ont pas envahie ni gâtée ; elle a conservé cette originalité puissante qui se retrouve toujours dans les œuvres de Dieu et que la main de l’homme tend partout et incessamment à détruire. Les chemins sont quelquefois difficiles, les auberges mat fournies, et nous en fîmes l’expérience. Mais on y respire plus librement le grand air, cet air si bon que le bon Dieu a fait, comme disait Napoléon à Saint-Hélène ; on n’y est coudoyé par personne, on n’y rencontre guère sur les chemins que les gens du pays, et certes ce n’est pas là que me serait échappée cette boutade poétique que je retrouve, non sans quelque confusion, sur mon portefeuille de voyage, et que j’y aurai sans doute écrite dans un moment de mauvaise humeur au milieu des merveilles trop visitées de l’Oberland
Admirable Oberland, que tant de lacs fécondent,
Où la neige et les monts et les Anglais abondent,
Chef-d’œuvre du Très-Haut, lieu vraiment enchanté,
Que je serai content quand je t’aurai quitté !
Outre le charme de la grandeur et de la solitude, le Tyrol a celui des vieilles traditions qu’il a conservées. Les