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premiers signaux

ils sont vivants tous les trois ; ils ont pu parvenir à leur but ; ils sauront bien revenir. »

Les préparatifs de départ ne furent pas longs. Bientôt un train rapide emportait vers le Havre l’astronome et sa fille ; le Labrador de la Compagnie Transatlantique les débarquait huit jours après à New-Vork et, le 17 août 188., ils arrivaient à la station astronomique de Long’s Peak, où régnait la plus grande animation.

Mathieu-Rollère se fit longuement expliquer les conditions dans lesquelles avait été faite l’observation du 28 juillet, qui avait jeté dans le monde savant une telle émotion.

« J’étais, lui dit l’honorable W. Burnett, à mon poste d’observation ; le grand télescope était braqué sur la Lune et j’observais la partie dans l’ombre, lorsque tout à coup une lueur insolite attira mon attention. Je ne distinguai pas d’abord très nettement la nature et la disposition de cette lueur, et, pour pouvoir la définir plus nettement, j’adaptai au télescope un oculaire de grossissement supérieur. Il me sembla distinguer alors une sorte de traînée irrégulière dont les contours étaient vagues et semblaient parfois interrompus. Je n’hésitai pas alors à employer le plus fort grossissement dont je pusse disposer. Cette fois l’image m’apparut nette et précise : c’étaient des lignes droites très déliées, formant entre elles des angles dont, au premier abord, je ne me rendis pas bien compte. Cela ressemblait vaguement à une figure géométrique ; on eût dit deux paralléles coupées par des sécantes.

« Je cherchais en vain l’explication de ce phénomène, lorsque tout à coup une idée traversa mon esprit : « C’est une M, m’écriai-je ; c’est l’ingénieur Marcel qui signale sa présence.

« Mon émotion fut si vive que ma vue s’en trouva troublée, et pendant quelques instants il me fut impossible de rien distinguer.

« À ce moment j’étais seul. Hors de moi, je quittai l’oculaire du télescope et descendis dans l’observatoire. J’avais le visage si bouleversé que mes collègues s’empressèrent autour de moi, me demandant avec anxiété ce qui était arrivé. Je fus quelques instants avant de pouvoir répondre ; puis je m’écriai : « Si mes yeux ne m’ont pas trompé, je viens d’avoir la preuve que les voyageurs de la