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un monde inconnu

Il en résultait des mélodies d’un charme inexprimable, des concerts harmonieux dont la douceur berçait mollement les âmes, réveillait dans les cœurs les plus nobles sentiments et formait un merveilleux accompagnement aux grandes scènes dramatiques qui se déroulaient sous les yeux des spectateurs émus.

C’était dans la capitale du monde lunaire que se célébraient ces fêtes, qui devaient leur magnificence non à l’entassement puéril ou prétentieux de vaines somptuosités, mais au choix délicat, à la grandeur des conceptions artistiques dont elles étaient le prétexte et l’occasion. Ses habitants n’étaient pas, du reste, les seuls à jouir de ces spectacles magnifiques. Avec les moyens que la science avait déjà depuis longtemps vulgarisés dans ce monde privilégié, tout ce qui se faisait, tout ce qui se disait sur ces scènes grandioses était immédiatement transmis dans toutes les villes et dans les villages les plus reculés. Ceux qui n’avaient pu se rendre au lieu où siégeait le gouvernement, avaient sous les yeux, avec la fidélité la plus scrupuleuse, ces imposants spectacles. Ils voyaient les acteurs, ils les entendaient, ils percevaient le son des instruments. Rien n’était perdu pour eux et, dans ces jours où s’exaltait le culte de la patrie et de la vertu, la population entière de la Lune était réunie dans un élan commun de ferveur et d’amour.

De vastes salles, savamment aménagées pour l’acoustique et pour la vue, recevaient les nombreux spectateurs que ces fêtes attiraient.

Sur des gradins largement espacés, chacun était commodément assis, et n’était géné, comme dans nos théâtres étroits où l’on s’entasse pour s’étouffer, ni par ses voisins, ni par le va-et-vient des gens égoïstes ou distraits qui ne se font nul scrupule de déranger vingt personnes pour regagner leur place. On n’avait ménagé ni l’air ni l’espace, et, du reste, tous les assistants, pénétrés de la gravité de ces représentations, jouissaient, d’un esprit recueilli et d’un cœur ému, des grandes scènes qui se déroulaient devant eux.

Comme ceux qui se rendaient à ces solennités y venaient non pour se montrer ou pour faire un fastueux étalage de joyaux ou de toilettes voyantes, mais pour s’y abandonner aux plus nobles jouissances de l’art, les architectes qui avaient construit ces vastes