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Page:Sélènes Pierre un monde inconnu 1896.djvu/51

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mathieu-rollère

jamais s’opposer à l’union des deux jeunes gens, et Jacques travaillait avec confiance pour faire à celle qu’il adorait une situation heureuse et honorée dans le monde. Aussi, grande avait été sa surprise et grand son désespoir lorsque, à la demande de lui accorder la main d’Hélène, son oncle avait répondu par un refus catégorique. Il savait que rien ne ferait revenir l’astronome sur sa résolution, et il s’était éloigné le cœur brisé et disant à Hélène qu’étouffaient les sanglots : « Je vais chercher les moyens de vous mériter. »

À partir de ce moment, la vie avait été bien triste pour la jeune fille ; elle se consumait dans une attente que chaque jour rendait plus désespérée. Jacques, depuis son départ, n’avait pas donné signe de vie, et elle se demandait parfois si celui qu’elle aimait ne l’avait pas oubliée, ou même s’il n’était pas mort dans quelque aventure périlleuse. Son teint avait pâli, ses yeux avaient perdu leur éclat, sa santé même paraissait s’altérer.

Cependant le vieux savant, tout entier à son œuvre, ne s’apercevait de rien. C’est à peine s’il jetait sur sa fille, qu’il voyait seulement à l’heure des repas, un regard distrait ; il ne remarquait pas les changements qui s’étaient opérés en elle.

Huit mois s’étaient déjà écoulés depuis le départ de Jacques : Hélène n’espérait plus.

Un matin des derniers jours du mois de février, la sonnette de la porte du jardin s’agita bruyamment, comme secouée par une main vigoureuse, et Hélène, qui était assise dans sa chambre, ressentit sans savoir pourquoi comme un coup au cœur. La vieille servante avait couru ouvrir.

En voyant le visiteur qui entrait et d’un pas rapide gagnait la maison, la jeune fille s’était levée toute droite, ses traits s’étaient couverts d’une étrange pâleur, et elle était retombée presque anéantie sur son siège.

Ce visiteur, c’était Jacques.

Il s’élança joyeux dans la petite salle où si souvent il s’était assis entre son oncle et celle qu’il aimait. Le vieux savant, qui se disposait à se rendre à l’Observatoire, venait d’y pénétrer.