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A LUCILIUS. — XCII.
XCII
sénèque s’élève contre les épicuriens ; le souverain bien ne consister pas dans la volupté.

Vous et moi nous serons, je pense, d’accord sur ce point, que les objets extérieurs s’acquièrent pour le corps ; qu’on ne soigne le corps qu’en considération de l’âme ; que dans l’âme sont des facultés subalternes par le moyen desquelles nous nous mouvons, nous prenons de la nourriture, et qui nous ont été données pour le service de la portion qui commande. En cette portion maîtresse, il est quelque chose d’irrationnel, et quelque chose de rationnel. La fraction irrationnelle est soumise à la fraction rationnelle, qui seule est indépendante, et fait dépendre de soi toutes choses. Car cette raison divine, qui commande à toute la nature, n’obéit à rien ; la faculté rationnelle de l’homme participe au même avantage, puisqu’elle en est une émanation.

Si nous sommes tous deux d’accord sur ce point, nous devons l’être aussi sur cette conséquence nécessaire, que le bonheur delà vie consiste uniquement dans la perfection de la raison ; car seule la raison ne laisse jamais fléchir son courage et fait tête à la fortune. Dans quelque situation que l’homme se trouve, elle lui conserve la sécurité de l’âme. Or, le seul bien est celui qui n’est jamais entamé. Il est donc heureux, dis-je, celui que rien ne peut abaisser ; il est toujours au-dessus des événements, et n’a d’autre soutien que lui-même : car celui qui s’appuie sur quelque support étranger, peut tomber.