I. Vous m’avez demandé, Lucilius, pourquoi les gens de bien, si le monde est gouverné par une Providence, éprouvent tant de maux. La réponse trouverait mieux sa place dans un ouvrage où je prouverais que la Providence préside à l’univers, et que Dieu est présent parmi nous ; mais puisqu’il faut, pour vous satisfaire, traiter séparément cette petite partie d’un si grand sujet, et m’attacher à cette unique objection, sans entamer le fond du procès ; je me charge d’une tâche peu difficile ; je vais plaider la cause des dieux. Il est inutile de montrer en ce moment que cette machine immense ne se maintiendrait pas sans un gardien puissant ; que les astres, dans la constance de leurs révolutions diverses, ne suivent pas un mouvement fortuit ; que les choses produites par le hasard sont sujettes à des perturbations fréquentes et à de promptes collisions ; qu’au contraire, une loi éternelle régit cette harmonieuse rapidité qui soutient tout ce qu’embrasse l’immensité des terres et des mers, ainsi que tous ces flambeaux qui brillent en leur place et à leur tour ; qu’un pareil ordre n’appartient pas à la matière vaguement agitée ; qu’une réunion d’éléments sans plan et sans dessein n’aurait ni cet équilibre ni