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poète universel après Homère, et Dante le poète catholique après Virgile. Rome avec l’Énéide reçut les origines de Troie et son berceau dans l’Orient. Par le poète florentin, la vie des peuples modernes se rattache à celle de l’ancien monde, en traversant l’Italie pour arriver à la Grèce, et la Grèce pour atteindre au commencement de toutes choses.

Ainsi une littérature considérée du point de vue le plus élevé, n’est que l’expression de la vie d’un peuple : d’où il s’ensuit que tout peuple a sa littérature propre, imitée sans doute, en la manière que nous avons dite, mais originale encore et tout empreinte des conditions spéciales de temps et de lieu qu’elle doit réfléchir. Une littérature est un fruit du temps qui suppose toujours une longue existence antérieure, et qui, comme les fruits de la terre, ne garde qu’un moment les couleurs et les parfums de la maturité. L’âge heureux où l’homme sent en lui toute sa vie, suppose l’enfance et la jeunesse dans le passé, la vieillesse et la décrépitude dans l’avenir. La virilité d’un peuple, c’est cette époque de force et d’accomplissement, de calme et de plénitude, qui marque l’entier développement des facultés. Telle fut pour les Romains l’époque d’Auguste, où Rome avait touché tous les points du cercle qu’elle devait remplir, et où il ne restait plus qu’à poser les bornes de toutes choses. Ces bornes furent en effet posées, dans la littérature comme dans la politique, pour un seul moment ; car le sommet d’une montagne n’est qu’un point presque sans étendue entre deux longues pentes, l’une qu’il faut monter, l’autre qu’il faut descendre. En gravissant la pyramide