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Page 345. Elle ne songe plus à prendre des alimens

Et le jour a trois fois chassé la nait obscure,
Depuis que votre corps languit sans nourriture.

(Racine, Phèdre, acte i, sc. 3)

Débarrassez-moi de ces robes de pourpre, etc. Racine a encore imité ce passage, mais il ne prête pas à Phèdre le même sentiment ; il la fait parler comme une femme qui souffre de tout et partout, pleine de malaise et d’ennui. Dans Sénèque, elle ne se plaint pas des vêtemens qui la gênent, mais elle veut en prendre d’autres plus conformes à son désir de parcourir les forêts sur les pas d’Hippolyte.

Que ces vains ornemens, que ces voiles me pèsent !
Quelle importune main, en formant tous ces nœuds,
A pris soin sur mon front, d’assembler mes cheveux ? etc.

(Acte i, sc. 3.)

Page 349. Quand on craint les rois, il faut renoncer à la justice. Cette parole est terrible, mais injuste. Samuël a fait de la royauté un tableau bien sombre et bien dur, mais ce trait ne s’y trouve pas. Il semble qu’une pièce où de pareils mots se rencontrent n’ait pu être écrite à Rome que sous la république, ou composée plus tard sous les empereurs, à la condition expresse de n’être jamais représentée ni publiée.

Page 353. Il n’est pas de vie plus libre. Sénèque développe ici un thème banal et propre a ces époques malheureuses où l’homme, égaré dans la civilisation, veut revenir en arrière et s’entoure de toutes les images d’une vie simple et primitive. Ce malaise et ces regrets sont communs aujourd’hui parmi nous, et tous nos grands littérateurs les ont exprimés. Les lettres de Sénèque sont remplies de ces plaidoyers contre la civilisation. Du reste il est inutile de dire que ce long discours d’Hippolyte ne convient point à la tragédie c’est un fragment de poëme, une élégie brillante et passionnée, tout ce qu’on voudra, mais non pas une partie de dialogue.

Page 359. Mais la perversité de la femme est au dessus de tout. Il y dans ce jugement, porté contre la femme, plus que la