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Page 303. Prendre pour épouse la fille de son propre frère. Agrippine était fille de Germanicus, frère de Claude. Ce mariage, suivant les lois romaines, était incestueux : « Pactum inter Claudium et Agrippinam matrimonium jam fama, jam amore inlicito firmabatur ; necdum celebrare solemnia nuptiarum audebant, nullo exemplo deductæ in domum patrui fratris filiæ : quin et incestum ac ; si sperneretur, ne in malum publicum erumperet metuebatur, etc. » Vitellius se chargea d’aplanir les difficultés. (Tacite, Annales, liv. xii, chap. 5.)

Mais ce lien du sang qui nous joignait tous deux,
Écartait Claudius d’un lit incestueux :
Il n’osait épouser la fille de son frère.
Le sénat fut séduit ; une loi moins sévère
Mit Claude dans mon lit et Rome à mes genoux, etc.

(Racine, Britannicus, acte iv, sc. 2.)

La tête de Silanus fut sacrifiée au caprice d’une femme. Quatre Silanus périrent sous les premiers Césars. Celui dont on parle ici est Lucius Silanus, à qui Claude avait promis sa fille Octavie. Il était frère de Junia Calvina, festivissima omnium puellarum, dit Sénèque : decora et procax soror, dit Tacite, Annales, liv. xii, chap. 4. Elle aimait tendrement son frère, et leurs ennemis les accusèrent d’inceste, quoiqu’ils ne fussent coupables que d’un peu d’indiscrétion. (Racine, préface de Britannicus.) Silanus, d’abord chassé du sénat, déchu de l’hymen d’Octavie et dépouillé de la préture, se tua lui-même le jour du mariage de Claude, « sive eo usque spem vitæ produxerat, seu delecto die augendam ad invidiam. » (Tacit., Annal. lib. xii, cap. 8.)

Par moi seule, éloigné de l’hymen d’Octavie,
Le frère de Junie abandonna la vie,
Silanus sur qui Claude avait jeté les yeux,
Et qui comptait Auguste au rang de ses aïeux.

(Racine, Britannicus, acte i, sc. 1.)

Je vous fis sur mes pas entrer dans sa famille,
Je vous nommai son gendre et vous donnai sa fille.
Silanus qui l’aimait, s’en vit abandonné,
Et marqua de son sang. ce jour infortuné.

(Ibid., acte iv, sc. 2.)