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Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 1.djvu/194

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félicité générale et individuelle de l’homme social, la
moralité de ses actions, le prix de ses vertus et le terme
de ses désirs, sans avoir besoin de recourir au pouvoir
dangereux des opinions hasardées ou chimériques, qui,
lorsque le peuple les croit, sont mauvaises par cela seul

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qu’elles le trompent, et plus funestes encore dès qu’il est
désabusé, parce qu’elles entraînent dans leur ruine l’édifice
fragile construit sur leur base éphémère.
Socrate lui-même, en s’attachant à établir l’immortalité
de l’ame, s’appuie sur des principes qu’auroient pu

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lui contester les Locke de son siècle ; et loin d’expliquer
comment l’ame ayant commencé, ne pourra finir, il
conclut qu’elle survivra au corps de ce qu’elle existoit avant

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lui, et il donne de cette exis|tence antérieure une preuve
qui n’est qu’une hypothèse chimérique [S 1]. C’est encore

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par elle et par ses conséquences qu’il réfute l’opinion
naturelle de ceux qui n’en font qu’un résultat harmonique.
Il dit de plus que, puisqu’elle conçoit des abstractions
simples, elle est nécessairement indivisible comme elles,


[JM 1]

  1. Voyez le Phédon.
  1. C, XXXVe Rêv., p. 200-205 = l. 437-488, note 13 (depuis l. 2 : *On),
    l. 489-92. – 437-41. Socrate n’explique point comment – 441-3. finir ; mais il conclut de ce qu’elle existoit avant le corps, qu’elle doit lui survivre, et il donne – 444-61. n’est, tout au plus, qu’une hypothèse hasardée. C’est par les résultats de cette même hypothèse, qu’il cherche à répondre à ceux qui ne font de l’ame qu’un résultat harmonique. Comme on lui accorde tout, il avance toujours. Il demande si les preuves qu’il a données sont suffisantes, et quoiqu’il n’en ait point donné de réelles, on lui répond, très-suffisantes assurément : alors il en tire à merveille toutes les conséquences qu’il veut. La réfutation de plusieurs endroits du Phédon seroit trop facile. *Il me semble qu’en partageant même avec les interlocuteurs le désir de la conviction, tout ce que je pourrois dire à leur place, se réduiroit à peu près à ceci. *Les conséquences tirées de la difficulté d’attribuer le sentiment ou la pensée à la matière, sont des conséquences purement gratuites ; conséquences inutiles, puisqu’on ne conçoit pas davantage l’existence de l’esprit que l’on ne conçoit la matière pensante ; conséquences fausses,