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Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 1.djvu/64

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celle-ci nous communique de son repos ; mais notre durée,
plus longue que celle de la plante annuelle, résiste à leur
action extrême pour ne se point épuiser dans son premier
été, ni finir à son premier hiver. C’est ainsi que notre

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nature, se refusant à l’influence d’une activité trop consumante,
et d’une décomposition trop prématurée, nous

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soustrait aux effets des deux périodes absolus, en nous
laissant seulement sensibles aux impressions encore modérées
du printemps et de l’automne, qui animent et calment

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alternativement notre vie, sans la fatiguer ou l’arrêter.
Dès que la nature visible est activée par les émanations
de l’astre qui la féconde, et reprend à nos yeux sa force
productive suspendue dans les hivers, ce mouvement
nouveau imprimé à tous les êtres, facilite notre vie, et nos

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desirs s’embrasent au feu de l’impulsion générale : tout
nous entraîne, tout promet, tout séduit ; avides d’extension,
nous ne voyons sur sa trace rapide que joies, espérances,
illusions heureuses ; pleins de confiance et de
séduction, nous hâtons l’avenir pour y précipiter notre

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vie. C’est ainsi que nous chérissons la saison où nous sentons
plus ardemment et plus heureusement, et où nous
existons en quelque sorte davantage.
Doux printemps, jeunesse toujours nouvelle de l’inépuisable
nature, tous les cœurs ont aimé tes premiers beaux


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    nique quelque chose du repos et de l’affoiblissement qu’elle prépare. Mais comme notre organisation est susceptible d’une durée plus – 152-5 annuelle, nous résistons à l’influence –156. ou d’une décomposition prématurée – 157-8. *Soustraits en partie à l’effet de ces deux périodes, nous restons plus sensibles aux impressions modérées – 159. automne : elles animent – 160. fatiguer, sans l’arrêter.

  1. C, VIIIe Rêv., p. 41 = l. 161-183. – 161-79. Quand la végétation annonce le retour de la force suspendue dans les hivers, ce mouvement nouveau semble faciliter la vie. L’impulsion générale éveille les desirs : on aime la saison où l’on sent plus avidement et où l’on croit qu’on va vivre davantage ; on rentre dans le songe du bonheur ; et ces momens séduisans sont encore embellis par l’attente des saisons fécondes.