Aller au contenu

Page:Sénancour - Rêverie sur la nature primitive de l’homme, tome 1.djvu/72

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
pour celui qui l’a oubliée dans des habitudes étrangères ;
quel silence pénible pour celui qui pressent son langage
et ne peut pas l’entendre !

345

Quand une atmosphère douce et une terre fertile présentent
par-tout les alimens et l’asile, l’activité et le repos,
qu’avons-nous besoin de tous ces efforts d’un art qui
falsifie les dons de la mère commune ? pourquoi languir

[72]

dans ces amas de stériles décombres, dont | d’insensés

350

travaux nous ont construit d’étroites et hideuses prisons ?
Que ces chaînes ridicules sont pesantes et peut-être
indissolubles ! Quoi ! nous qui conservons encore quelque trace
de notre forme originelle, nous ne pourrons, libres de cette
insidieuse oppression, fuyant une terre conquise et dévastée,

355

respirer en paix sous le beau ciel des tropiques, dans
des contrées indépendantes, dont les productions naturelles
fourniroient bien mieux à nos vrais besoins, où nous
n’aurions plus à souffrir les insipides jouissances, à recevoir
les funestes bienfaits, à partager les inévitables misères

360

de l’homme des cités ?
Dans l’hiver de nos climats la nature semble justifier
nos arts. Affoiblis comme nous le sommes par notre
manière de vivre, nous pourrions difficilement supporter
les frimats, et il faut bien que nous aimions nos tristes

365

asiles, puisqu’enfin ils sont vraiment commodes, et que


[JM 1]

    342. l’a oubliè sous le joug des habitudes – 343-4. silence pour – pressent, et qui ne peut pas entendre !

  1. C, VIIIe Rêv., p. 46-49. = l. 345-463. – 345-7. l’atmosphère est douce et la terre fertile, qu’avons-nous – 347. des efforts – 348-9. les premiers dons ? Pourquoi s’enterrer dans – 349-52. de décombres dont un travail stérile a formé des prisons populeuses ? Ce sont de rians portiques pour de sombres cachots. Quoi ! – 353-4. pourrons, sous le beau ciel des tropiques, fuyant – 355. paix, dans – 357. besoins, et où – 359. les misères inévitables – 360. des villes ? – 362. Affoiblis par – 364-5. aimions nos retraites arides, puisqu’enfin elles –