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LES PERSÉCUTÉS


Sont-ils bêtes, ces gouvernants !

Je ne m’amuserai point à discuter la mesure dont ils ont frappé le général Boulanger ; mais, juste ou injuste, elle n’en constitue pas moins la suprême maladresse.

Comment ne l’ont-ils pas senti, comment ne l’ont-ils pas compris ?

Voilà un homme qui est populaire. Pourquoi, je n’en sais rien, et peut-être ne le sait-il pas lui-même ; enfin il est populaire à tel point que les ministres tremblent, que la Chambre claque des dents, que le Sénat sanglote sous lui, rien qu’à l’écho de ce nom. Et pour éteindre cette popularité, pour détacher le peuple de cet homme, que fait-on ?… On l’expédie dans un coin de province ; on lance à ses trousses tous les mouchards de France, on lui inflige trente jours d’arrêts de rigueur ; on espionne ses amis ; on intercepte ses lettres — on le révoque !

Or, quelle est la situation de l’officier révoqué ? À peu de chose près celle qu’indique Victor Hugo dans