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NOTICE BIOGRAPHIQUE


d’Urre et de Gabrielle, sœur de Blanche. Tous les Grignan arrivèrent en 1688, pour seconder madame de Grignan dans ses démarches et ses sollicitations. Le procès, qui durait depuis six ans, fut jugé cette année contre M. d’Aiguebonne ; il le perdit tout d’une voix, avec tous les dépens. Madame de Sévigné, en annonçant à Bussy cet heureux succès, dans une lettre du 13 août, gémissait sur une nouvelle peine qui allait succéder à celle-là. Rien n’allait plus retenir sa fille à Paris, et son prochain départ pour la Provence était devenu inévitable. Le procès eut cependant encore d’autres phases. Madame de Sévigné espéra, l’année suivante, qu’il ramènerait à Paris madame de Grignan, alors éloignée d’elle. Comme elle mettait toujours tout à profit pour se procurer cette joie, elle ne manqua pas d’écrire à sa fille qu’il fallait se disposer à venir et qu’elle seule pouvait bien défendre ce grand intérêt. M. d’Aiguebonne s’était pourvu contre l’arrêt obtenu par les Grignan. La contrariété d’arrêts, qu’il invoquait devant le grand conseil, y fut rejetée en mars 1689[1]. Madame de Sévigné avait combattu, comme elle disait, sous les enseignes de sa fille, alors absente. Le chevalier de Grignan surtout avait eu une grande part à la victoire. Le triomphe fut enfin complet au mois d’août 1690. Le parlement débouta M. d’Aiguebonne de sa requête civile, comme le grand conseil l’avait déjà débouté de sa requête en contrariété d’arrêts, et le condamna à payer l’amende au roi et à M. de Grignan[2]. Cette fois c’était l’évêque de Carcassonne qui avait porté le principal poids du combat. Le zèle de madame de Sévigné l’avait certainement secondé. La passion dont elle était animée, toutes les fois qu’il s’agissait des intérêts de sa fille, se montre avec une vivacité plaisante dans la lettre où elle lui donne la nouvelle de cette victoire définitive. Elle la compare aux victoires qui venaient d’être remportées à Fleurus et à Staffarde. M. de Carcassonne va de pair avec Luxembourg et Catinat. « Je chante, disait-elle, un Te Deum dans mon cœur. » L’amende de M. d’Aiguebonne lui faisait surtout pousser des .

  1. Lettre de madame de Sévigné à madame de Grignan, 16 mars 1689.
  2. Lettre à madame de Grignan, 27 août 1690, et lettre à M. de Lamoignon, même date.